La désintermédiation croissante des sources de financement, en particulier pour les PME et les ETI, est une tendance qui se vérifie depuis la crise financière de 2008. (1) En effet, des sources alternatives de financement se développent comme l’equity-crowdfunding (ECF), ou financement participatif en capital, et l’émission d’obligations convertibles (OC). Ainsi, il nous paraît intéressant, dans un premier temps, d’analyser les motivations et les limites des entreprises qui ont recours aux obligations convertibles. Puis, dans un second temps, nous mettrons en relief l’émergence des Euro PP pour soutenir le financement des ETI européennes.
Après une année 2015 forte en nouvelles émissions obligataires convertibles en Europe (pour 19 Mds€), l’année 2016 confirme cette tendance avec des émissions obligataires de la part de LVMH, Vodafone et BP notamment, pour un montant total de 25Mds€ : c’est la meilleure année depuis 2007. (2) Pour une entreprise, émettre des obligations convertibles est un moyen alternatif de bénéficier de ressources financières nécessaires à son développement. L’obligation convertible est une obligation à laquelle est attaché un droit de conversion offrant à son porteur (l’obligataire) le droit d’échanger l’obligation en action d’une société (selon une parité de conversion préfixée) ou le droit de se faire rembourser son obligation, dans une période future prédéterminée.
Le recours aux obligations convertibles par une entreprise permet d’accroître la confiance des investisseurs et de diversifier son mode de financement. En effet, l’investisseur en obligations convertibles pourra à l’échéance du contrat soit, se faire rembourser la créance en devenant propriétaire d’actions ayant une valeur réelle supérieure à la valeur antérieurement figée, soit se faire rembourser en numéraire si la société s’est dévalorisée. En somme, le recours aux obligations convertibles permet à l’investisseur de tirer profit du développement de l’entreprise sans prendre le risque de l’actionnaire. L’utilisation des obligations convertibles permet également la préservation de la structure du capital social, au titre des 1ère années, contribuant ainsi à faciliter les investissements et le développement de l’entreprise. En effet, les obligations convertibles ne sont pas des créances à rembourser immédiatement. En revanche, le contrat d’émission défini la valeur des actions de la société attribuées au terme du contrat si la conversion a lieu. L’entreprise ne peut donc pas attribuer les actions à leur valeur réelle à l’échéance des obligations convertibles. De plus, en cas de conversion des obligations en actions, il existe un risque de dilution du capital social. La conversion peut donc avoir un impact défavorable, pour le dirigeant-actionnaire, sur la répartition des dividendes ainsi que sur le droit de vote lors des assemblées générales ultérieures et donc sur les prises de décisions. Enfin, dans l’hypothèse d’une non-conversion des obligations, l’entreprise se doit de constituer une trésorerie permettant de rembourser en numéraire les créances de l’obligataire. Ce besoin accru en trésorerie peut impacter négativement les investissements nécessaires au développement de l’activité de l’entreprise. (3)
Enfin, l’émergence du marché des Euro Private Placements (Euro PP) permet également de soutenir le financement des entreprises de taille intermédiaire (ETI) en Europe. Rappelons qu’un Euro PP est une opération de financement sous forme d’obligation ou de prêt à moyen ou long terme entre une entreprise, cotée ou non, et un nombre restreint d’investisseurs institutionnels. (4) Entre 2012 et fin 2015, le montant cumulé d’émissions a été de 13,5 milliards d’euros. (5)
Pour conclure, les obligations convertibles s’inscrivent dans une évolution structurelle du modèle de financement d’un nombre croissant d’entreprises. Cette évolution tient à un environnement de taux bas qui pousse les investisseurs à s’intéresser à de nouvelles classes d’actifs plus rentables, un changement du modèle de financement de l’économie dans le sillage des nouvelles exigences réglementaires bancaires de Bâle III et la volonté des ETI de diversifier leurs canaux de financement, aujourd’hui principalement bancaires, et d’optimiser leurs coûts de financement à la manière des plus grandes entreprises. (6)
Sources :
1- P. Quiry et Y. Le Fur (2015). « Evolution des sources de financement des entreprises non financières », Finance d’entreprise Pierre Vernimmen, Paris, Dalloz.
2- F. Masson (2017). « Hausse des taux d’intérêt : et si on passait aux obligations convertibles ? », Les échos.
3- « Les obligations convertibles », https://www.leblogdudirigeant.com/obligations-convertibles/
4- « Qu’est-ce que les Euro Private Placements ? https://www.economie.gouv.fr/lancement-de-la-charte-des-euro-private-placements
5- « L’Euro-PP, un mode de financement à MLT pour les ETI qui a le vent en poupe » http://www.leblogdesfinanciers.fr
6- La Lettre Vernimmen.net avril 2014, n°123